mercredi 23 décembre 2009

Sur la route (à réessayer).


Un gars de l'Ouest, de la race solaire.
Etre "beat", c'est rejeter le passé et le futur, se rebeller contre toute autorité organisée, mépriser le "Square". Le "Square" est celui qui vit enfoncé dans son ornière, qui croit témoigner par sa vie en faveur de toutes les valeurs décentes, en un mot le Bourgeois, le Salaud. D'autres termes, eux aussi empruntés au jazz et à la danse, servent à exprimer un état d'esprit, une morale vague, une esthétique plus vague encore : le mot "cool" : frais, léger; le mot "hip" : hanche; le mot "swing" : balancement...
Le "Beatman" s'oppose au "Square" en ce qu'il s'est désolidarisé. Il a rejeté le mensonge social, il s'est enfui sur les routes d'Amérique, loin de l'est industriel, les poèmes de Rimbaud dans une poche, dans l'autre ceux de Jean Genet, désespéré lucide, dur au coeur tendre, amer, pauvre, affamé - "beat" enfin ! Et à travers le coontinent "gémissant et terrible", chanté par Whitman, par Mark Twain, Par Thomas Wolfe, il a crié sa détresse, sa haine des poètes prébendés des Universités, nouveaux poètes de cour; il a trompé sa faim en fumant de la marijuana, il s'est saoulé à mort le samedi soir dans une petite ville des Rocheuses, il a mordu la poussière, passé quelques mois peut être dans une maison de correction où il s'est un peu converti, comme Oscar Wilde à la geôle de Reading, et un beau jour, dans une vieille bagnole volée avec des copains de rencontre, il est arrivé par la route de Sacramento jusqu'au point d'où l'on découvre San Francisco toute blanche au-dessus de la mer, et il s'est écrié comme les marins du Péquod apercevant Moby Dick : " voilà, elle souffle ! "